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Cycle thématique de l’Institut de Recherche et d'Histoire des Textes 2008-2009. - Les écoles au Moyen Âge avant 1200
L’école et l’enseignement au Moyen Âge font l’objet de recherches nombreuses qui ont abouti récemment à diverses manifestations. Or, si l’université est de mieux en mieux connue grâce à une documentation plus riche, la façon dont fonctionnaient les écoles antérieures reste largement dans l’ombre. D’où ce pari : étudier l’école médiévale avant l’âge des universités (propres au monde latin), mais dans une perspective comparatiste, embrassant l’ensemble du Bassin méditerranéen.
Pour ce faire, appuyé sur un Comité scientifique composé de Michel Cacouros, Anne-Marie Eddé, Judith Olszowy-Schlanger, Patricia Stirnemann et Jacques Verger, on a adopté, pour la vérifier, l’hypothèse de départ que l’école est avant le xiiie siècle une institution globalement commune et que les sources propres aux diverses aires culturelles peuvent, jusqu’à un certain point, se compléter. L’institution scolaire est donc abordée dans les mondes byzantin, arabe, hébraïque et latin sous divers angles, qui privilégient le cursus, le statut et l’autorité du maître ; le lieu, les méthodes et les fins de son enseignement ; la stabilité, le rayonnement de son école et le contexte politique, social ou culturel dans lequel elle s’insère.
Le 10 décembre 2008, une première journée d’études a dressé un panorama des connaissances dans les quatre aires linguistiques principales. Ce 18 mai 2009, six orateurs exploreront en complément des sujets plus ciblés, dans les domaines apparus prometteurs à l’issue de la première journée :
- le cas fameux et discuté de « l’école de Laon », propre à fournir des leçons de méthode, en particulier sur l’utilité d’une approche globale de la réalité scolaire ;
- les madrasas musulmanes, ici étudiées à Bagdad, dans lesquelles on vit au siècle dernier le modèle des universités occidentales ;
- l’iconographie du maître et de l’école au xiie s., et les diverses manières dont elle exprime la haute place faite alors au savoir et à l’enseignement ;
- la reconstitution, d’après un abrégé de droit civil, des méthodes par lesquelles on enseignait cette discipline dans le sud de la France, dès la première moitié du xiie siècle ;
- le recours à des textes brefs et à des images pour enseigner à Byzance l’étude du cheval et de sa santé ;
- l’école juive et la façon dont, du xie au xve siècle, elle évolue en s’inspirant parfois des studia chrétiens.
Chaque communication, d’une demi-heure, sera suivie d’un quart d’heure de questions et d’échanges. En fin de journée des discussions générales permettront de croiser exemples et points de vue.
2e journée d’études : Lundi 18 mai 2009, 9h30-17h
Institut de recherche et d’histoire des textes, Salle Jeanne Vielliard, 40, avenue d’Iéna, 75116 Paris
L’entrée est libre sur inscription préalable.
Contacts: dominique.poirel@irht.cnrs.fr et claudia.rabel@cnrs-orleans.fr
Programme et résumés des communications
9h30 Introduction
9h45 - Cédric Giraud (université de Nancy II): Faire l’histoire des écoles du xiie siècle: méthodes et enjeux
Le but de la communication est de proposer quelques réflexions générales inspirées par le cas particulier de l’« école de Laon ». Il s’agit de définir les limites et les enjeux d’une « histoire totale » des écoles. En effet, l’histoire scolaire constitue un chantier dont l’unité est souvent perdue de vue : trop fréquemment sont dissociés la question de l’existence institutionnelle des écoles, l’étude des manuscrits rattachés à un centre intellectuel et l’édition des textes en provenant, ainsi que l’examen d’une pensée remise dans le contexte d’une histoire longue. L’accent portera donc sur la manière d’unir les différentes opérations d’histoire institutionnelle, littéraire et intellectuelle. Les documents retenus sont aussi bien diplomatiques et historiques (cartulaires, chroniques) que littéraires et théologiques (commentaires scripturaires, recueils de sermons, correspondance). On s’interrogera également sur l’articulation entre l’histoire scolaire et des problématiques historiques censément plus larges.
10h30 - Vanessa Van Renterghem (INALCO, ENS, Paris): Les premières madrasas de Bagdad (xie-xiiesiècles) : bref état de la question
La madrasa, institution essentiellement destinée à l’enseignement du droit musulman (fiqh), s’est diffusée dans le monde musulman à partir du xie siècle depuis l’Orient iranien. Au xxe siècle, elle a été l’objet de spéculations historiographiques qui ont successivement fait de cette institution l’outil de la « renaissance sunnite » débutant au milieu du xie siècle, le lieu de formation des fonctionnaires des États musulmans de l’époque, voire le modèle des universités postérieures de l’Occident chrétien. La présente communication a pour but de faire le point sur ce que nous savons des madrasas à une époque relativement ancienne de leur histoire, en prenant pour exemple la ville de Bagdad où elles apparaissent dans la seconde moitié du xie siècle. Partant de sources historiographiques arabes, l’étude cherchera à faire le point sur la nature de ces institutions, le type d’enseignement dispensé (matières et méthodes), mais aussi le contexte politique de leur diffusion à Bagdad ainsi que les conséquences sociales et culturelles de leur implantation durable dans la ville.
11h15 Pause
11h30 – Laura Cleaver (Courtauld Institute of Art, Londres): L’image du maître au xiie siècle
L’art du xiie siècle proclame avec force l’importance de l’éducation. Des images d’enseignement apparaissent alors dans la sculpture, le vitrail et l’orfèvrerie aussi bien que dans les manuscrits. Tandis que l’enseignement est souvent représenté à travers la personnification des sept arts libéraux, la grammaire seule est peinte d’ordinaire sous la forme d’un maître. Munies d’un livre et d’une férule, les images de la grammaire expriment l’importance d’acquérir à la fois un savoir intellectuel et une formation morale. Ces aspects sont récurrents dans les images du roi Salomon, figuré comme un maître dans les Bibles du xiie siècle. Toutefois, à partir du milieu de ce siècle, des portraits de maîtres d’école contemporains ou presque sont insérés dans de luxueux manuscrits renfermant leurs œuvres. Les images de maîtres tels que Gilbert de la Porrée, Pierre Lombard ou Hugues de Saint-Victor insistent sur leur rôle de transmetteurs de l’orthodoxie et leur assignent une place dans un canon d’auteurs. On constate toutefois que l’iconographie d’un même maître pouvait considérablement varier, ce qui suggère que les artistes les adaptaient aussi en fonction de leur public.
12h30 Pause déjeuner
14h – Franck Roumy (université de Paris II): L’enseignement du droit civil en France au xiie siècle au miroir de la production scolaire
L’enseignement du droit civil s’est d’abord développé, en France, dans le Midi, vers 1130, dans des milieux proches de l’ordre de Saint-Ruf, avant de gagner le Nord, où il croît alors dans les lieux où s’installe, à partir des années 1160, un enseignement du droit canonique. Les témoignages directs relatifs au cadre matériel dans lequel étaient organisés des cours de droit civil sont inexistants. Les civilistes « français » ou transalpins ont cependant laissé une production livresque conséquente, qui permet d’appréhender leurs méthodes d’enseignement et les buts qu’ils poursuivaient. Après avoir dressé un rapide bilan de cette production et dégagé quelques caractères généraux, la présente communication tentera de mettre en lumière les méthodes d’enseignement utilisées, à travers l’exemple d’un abrégé de droit civil. Il s’agit d’un manuscrit actuellement conservé à la Bibliothèque municipale de Rouen, provenant de l’abbaye de la Trinité de Fécamp et confectionné dans le sud de la France dans la première moitié du xiie siècle.
14h45 – Stavros Lazaris (Étude des Civilisations de l’Antiquité, CNRS, Strasbourg): L’hippiatrie à Byzance : du manuscrit à l’enseignement
Le recours au cheval à Byzance (aussi bien qu’en Occident) se justifie notamment par le fait qu’il était le seul moyen de se déplacer rapidement ; pour cette raison, cet animal domestique était très largement employé pour les communications, mais aussi, et surtout, dans l’armée (cavalerie). Or, son organisme est particulièrement vulnérable. Fragilité naturelle couplée à un recours systématique à cet animal expliquent la raison d’être des enseignements portant sur la connaissance et la guérison du cheval, qui se reflètent dans les traités d’hippiatrie.
Ce type d’enseignement entrait souvent dans le cadre plus général de la médecine mais il faisait aussi l’objet, étant donné son caractère spécifique, d’une formation spécifique. Toutefois, les témoignages que l’on a conservés sur l’hippiatrie et, notamment, sur son enseignement à Byzance, sont relativement peu nombreux.
Dans ma contribution, je tâcherai donc de reconstituer, par les biais de ces témoignages, l’enseignement de l’hippiatrie, qui se faisait au moyen de textes brefs, servant de manuels, mais aussi grâce à l’image. Par conséquent, j’aborderai également la question des manuscrits comprenant ces textes et (ou) ces images. La figure du médecin enseignant l’hippiatrie et le cadre dans lequel s’insérait son enseignement, font également partie des éléments, d’un abord difficile, que j’examinerai.
15h30 – Colette Sirat (IRHT – EPHE, Paris): La yeshiva talmudique de Rashi à Troyes (tournant du xiie s.) et la yeshiva philosophique de Shem Tov Ibn Shem Tov en Espagne (2e moitié du xve s.)
À partir de l’âge de cinq ou six ans, tous les garçons apprenaient à lire et à écrire la Bible et les prières. L’enseignement supérieur était réservé aux plus doués ou aux plus riches. Dans les pays orientaux, le Talmud, la Loi orale (mise par écrit vers le viie-viiie siècles en Babylonie) était enseignée aux juges et aux rabbins dans des yeshivot. À partir du milieu du xie siècle, dans les pays rhénans et en France du Nord furent fondées des yeshivot où l’on étudia aussi le Talmud. Mais, en Europe du Nord, cet ensemble de textes de droit, considéré comme une source de connaissance égale ou supérieure à la Loi écrite, fut enseigné à tous, dans le seul but d’approfondir la religion juive. Chaque maître fondait sa propre école et, si sa renommée était grande, les élèves venaient de très loin.
Dans les pays du Sud, à l’enseignement du Talmud s’ajoutaient les sciences et la philosophie ; elles étaient enseignées par des maîtres privés, avec une exception : dans l’Espagne du xve siècle, existèrent des yeshivot de sciences étrangères, sciences et philosophies profanes, et ces écoles étaient calquées sur les yeshivot de Talmud mais aussi, probablement, sur les studia chrétiens.
Discussion finale
Un verre amical conclura la journée.
1re journée : 10 décembre 2008
La première journée du cycle consacré aux écoles au Moyen Âge a eu lieu le 10 décembre 2008, de 9 h à 17 h à l’IRHT. Elle a dressé un panorama de l’état des connaissances grâce à cinq conférences, de 30 à 40 minutes, consacrées :
- au monde byzantin (Michel Cacouros, EPHE, IVe section),
- au monde arabe (Anne-Marie Eddé, IRHT),
- au monde hébraïque (Judith Olszowy-Schlanger, EPHE, IVe section),
- au monde latin (Jacques Verger, Paris IV – EPHE, IVe section),
- à l’iconographie du maître et des écoles (Patricia Stirnemann, IRHT).
Une large place sera accordée aux discussions, pour faire émerger des convergences et des clivages dans le temps ou l’espace. Lors de cette journée, on s’efforcera de repérer les perspectives de recherche les plus neuves et prometteuses, qui seront présentées au printemps 2009, lors de la seconde journée.
Source: http://www.irht.cnrs.fr/formation/ecoles-2008-2009.htm
Autre page: Compitum.fr, http://www.compitum.fr/index.php?option=com_eventlist&Itemid=32&func=details&did=1084
et Programme en PDF: http://www.irht.cnrs.fr/formation/Ecoles2-invitation-PDF-livret-pliable.pdf