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8 juil. 2010

Univ. Paris-Ouest Nanterre La Défense, CHAD, colloq pluridisc: "Puissances de la Nature - Justices de l’Invisible: du maléfice à l'ordalie, de la magie à sa sanction", Nanterre, 2-3 déc 2010

Information transmise par S. Kerneïs:
Université Paris Ouest Nanterre La Défense
 
Centre d’Histoire et d’Anthropologie du droit

Colloque pluridisciplinaire

Puissances de la Nature - Justices de l’Invisible:
du maléfice à l'ordalie, de la magie à sa sanction

2 et 3 décembre 2010
Nanterre

Organisé par Soazick Kerneis et Raymond Verdier
avec le soutien de l’Ecole doctorale et de l’Association française Droit et Cultures

"Si ceux qui ne croient pas au Ciel ne peuvent s’empêcher de
nimber de divin leur justice, il n’est pas inattendu que ceux
qui y croient s’évertuent à faire de la leur l’accomplissement
de la justice de Dieu"
(Jean Carbonnier, 
Codicille du juste et de l’injuste, 1975,
Flexible Droit)

Synopsis
«Planète en danger», «Sauver la Nature», telles pourraient être les devises de notre monde moderne. Mais cette Nature, objet de notre inquiétude, est celle des biologistes, des sciences naturelles, une nature mise en fiche, et, croit-on, ordonnée, organisée, en fait, désenchantée.
Depuis déjà longtemps, dans nos sociétés occidentales, prévaut le dogme de la Raison, ou s’impose - ou prétend s’imposer - la mesure qui appréhende les choses, les actes et finalement se saisit de l’homme. L’hybris n’est plus, non plus que les dieux jaloux, ni même l’égarement des sens.
Le Droit s’est fait système, phénomène total, qui modèle la pensée, capture le fait de l’homme, celui de l’animal, jusqu’à celui des choses. Le jugement est application de la norme, produit du syllogisme. La justice tranche, résout, rationnellement.
Il n’en a pas toujours été ainsi. Il fut un temps où l’homme s’imaginait procéder de la Nature, où l’homme et l’animal se confondaient dans un même genre, où partout se repérait la trace de l’invisible. Nul mur, nulle limite ne structurait ni le temps, ni les lieux, ni les choses. C’était un temps déraisonnable où les morts côtoyaient les vivants et où l’homme pouvait parfois se penser animal, voire chose. La norme était là, obsédante mais cette norme, loin d’être comme un œil lointain, était familière, répétée, comme le Dit des Vrais Hommes.
A la différence des religions de la Toute-Puissance du Dieu Unique, qui pense tous les autres comme de faux dieux, des puissances démoniaques, les religions de la Nature envisageaient les Eléments - Air et Feu, Eau et Terre - comme un ensemble de forces spirituelles et l’homme comme un microcosme de l’Univers.
Porteurs de valeurs dynamiques ambivalentes, les Eléments ont alors au plan juridico-religieux un pouvoir normatif, positif ou négatif, de sanction: l’eau féconde et inonde, le feu purifie et foudroie, la terre productive bénit et maudit.
Dès lors, s’impose la conviction que rien ne relève du hasard, que toute action procède d’une cause déclenchée par une des puissances de la surnature. La justice passe par la manipulation du divin. Il faut interroger les puissances, et pour cela, entreprendre le grand voyage qui conduit au dépassement de soi, exécuter les rituels de divination, exiger le serment, imposer les épreuves corporelles pour identifier le coupable.
Ces croyances n’ont pas partout disparu. Elles connaissent même un relatif regain dans certains pays dits en développement, confrontés à la propension des pratiques sorcières. L’accélération de l’exode rural, l’accroissement de la pauvreté et les nouvelles formes d’accumulation des richesses, dans l’espace urbain ont en effet bien souvent conduit à exporter la sorcellerie en dehors du cadre familial et villageois. Le sujet est tabou et son caractère caché et secret rend difficile, voire impossible en l’absence de preuves matérielles, l’action judiciaire devant les tribunaux. Peu d’Etats actuellement poursuivent la sorcellerie meurtrière en tant que telle, ce qui rend d’autant plus urgent l’enquête sur ces pratiques.

C’est donc à une réflexion tant historique qu’anthropologique que convie le Centre d’Histoire et d’Anthropologie du Droit car l’histoire du droit doit se nourrir de l’anthropologie autant que l’anthropologie méditer les leçons du passé. Il s’agira de réfléchir sur les idées et valeurs véhiculées par certains couples de notions: visible/invisible - devin/sorcier - mal/maladie - parole/corps - coupable/victime … et au-delà, de tenter de comprendre quels sont les éléments constitutifs de l’ordalie, du jugement de Dieu, du jugement des ancêtres, de celui des esprits...

Contacts : soazick.kerneis@orange.fr ; raymond.verdier11@aliceadsl.fr ; nkalnoky@numericable.fr