Information transmise par V. Menes-Redorat:
Université de Cergy-Pontoise, Faculté de droit
Centre de Philosophie juridique et politique
Colloque
Cadavres interdits
IIIe volet de réflexion sur le Cadavre, approches transdisciplinaires et droits comparés
Cergy-Pontoise
18 décembre 2014 (9h30-13h)
Présentation
En avril 2012, Alicia Mazouz, organisait à l’université Panthéon-Sorbonne le premier volet interdisciplinaire intitulé «A corps perdus? Visions croisées sur le corps de la personne décédée». Il visait à proposer des réflexions croisées - histoire de l’art, histoire du droit, droit canadien et français - sur l’utilisation du corps à des fins de communication avec les vivants. Un second volet eut lieu en mars 2013, intitulé «Rencontres autour du cadavre humain, regards de l’histoire, la médecine, l’éthique et le droit», à l’initiative du Professeur Mariève Lacroix à l’université d’Ottawa, réunissant des médecins, bioéthiciens et juristes. Le 18 décembre 2014, se tient le troisième volet de réflexion autour du cadavre: «Cadavres interdits» à l’université de Cergy-Pontoise. Il a pour objectif, après les considérations didactiques et les utilisations (politiques, juridiques, sociétales, culturelles, médicales) du corps mort, d’envisager quelques uns des multiples interdits qui pèsent sur les défunts. Deux axes seront proposés: le premier met en question l’inviolabilité du cadavre, le second celui du corps «interdit» des criminels.
Valérie MENES-REDORAT,
maître de conférences en histoire du droit
à l’Université de Cergy-Pontoise.
Programme
9h30. - Accueil des participants autour d’un café
- 10h. - Propos Introductifs, Valérie MENES-REDORAT
I. - L’INVIOLABILITE DES MORTS?
- 10h15. - Alicia MAZOUZ, La présence des morts et le droit.
- 10h35. - Mariève LACROIX, L’inviolabilité du corps humain au-delà de la mort et la répression de certains interdits en droit privé québécois.
- 11h. - Anne-Laure MORIN, La recherche scientifique sur le corps mort ou sur ses éléments.
- 11h20. - Arnaud DEGOUZON, Le traitement juridique du corps du défunt. Interdictions & autorisations.
II. - LE CADAVRE «INTERDIT» DES CRIMINELS
- 11h 40. - Dominique LUCIANI MIEN, Les corps des suppliciés seront délivrés à leurs familles, si elles les réclament, à la charge par elles de les faire inhumer sans aucun appareil, (art. 14, CP).
- 12h. - Murielle PARADELLE, Brandon SILVER, Pour que la mort mette fin à leur tyrannie: Discussion autour du statut juridique du cadavre des auteurs de crimes politiques de masse.
12h30: Discussion de clôture
Contact
Lieu
- Université de Cergy-Pontoise. Faculté de Droit, 33, Bd. Du Port, 95011 Cergy-Pontoise, Salle des Conférences, RDC site des Chênes I.
- Accès:
- RER A: Direction «Cergy-Le Haut», arrêt Cergy-Préfecture
Résumés et Biographies
Alicia MAZOUZ, est doctorante en droit privé à la Faculté de droit de l’Université
Paris I – Panthéon-Sorbonne. Elle soutient prochainement sa thèse portant sur « Le prix du corps humain », sous la
direction du Professeur Grégoire Loiseau à l’École de droit de la Sorbonne. Juriste
de formation et chargée de cours, elle a enseigné le droit privé à l’Université
de Cergy-Pontoise où elle est également membre du Laboratoire d’Études
Juridiques et Politique (LEJEP). Soucieuse de placer la personne au cœur du
droit, elle a fondé et préside l’Association Personne et Droit qui organise des
rencontres transdisciplinaires autour du corps de la personne, des données
personnelles et de l’activité humaine.
« LA
PRESENCE DES MORTS ET LE DROIT »
Les morts restent parmi
les vivants sous diverses formes, par leurs images, leurs photographies, voire
leurs corps eux-mêmes. Pour autant, cette présence est-elle protégée par le
droit comme de leur vivant ? Il sera ici question de l'image des défunts
dans deux dimensions : l'image protégée du défunt (droit à l'image,
photographie mortuaire) et l'image renvoyée par le défunt en tant que corps qui
se maintient dans la cité (exposition des corps plastinés collection
anatomique, musées).
Mariève
LACROIX,
LL.B. (Montréal), LL.M. (Montréal), Master 2 (Paris I), LL.D. (Québec), est
professeure à la section de droit civil de la Faculté de droit de l’Université
d’Ottawa et secrétaire générale de l’Association Henri Capitant, section
québécoise. Ses intérêts de recherche et d’enseignement en droit privé
(obligations, personnes et famille) et comparé (axe franco-suisse) incluent la
recherche fondamentale et certaines dimensions plus pratiques. La polyvalence
de ses intérêts s’est matérialisée par des articles de périodique, des
contributions à des ouvrages collectifs et des monographies sur des sujets
variés, dont deux ouvrages, L’avocat diffamateur : ses devoirs de
conduite et la mise en œuvre de sa responsabilité civile et L’illicéité : essai théorique et
comparatif en responsabilité civile extracontractuelle pour le fait personnel. De
même, elle a donné des conférences
dans des cadres professionnel et universitaire, au Québec comme à l’étranger.
« l’inviolabilité du corps humain au-delà de la
mort et la répression de certains interdits en droit privé québécois »
Le droit à
l’inviolabilité de la personne humaine ne vise peut-être que la personne
vivante, puisque la personnalité juridique s’éteint au moment du décès. Si le
vivant a un corps, le mort est un corps en droit positif. Avec la mort, le
défunt perd certes sa personnalité juridique. Sa personnalité humaine est
néanmoins encore susceptible de produire des effets persistants, par un effet
en quelque sorte « irradiant ». La mort représente alors ce passage
de « l’être au ne plus être, ce qui implique que l’on ait été ». Devient-on pour autant
une « personne résiduelle » ou encore une « demi-personne
juridique » ? Le législateur québécois, qui protège l’homme depuis sa naissance
et jusqu’à sa mort, ne l’abandonne pas pour autant au moment où il cesse de
vivre. L’empreinte juridique du défunt prévaut. Le droit privé consacre le
principe de l’inviolabilité du corps humain au-delà de la mort et réprime
certains interdits envers le cadavre.
Anne-Laure MORIN, est
avocate, spécialiste en droit de la recherche biomédicale, droit du vivant et
de la bioéthique. Docteur en droit, sa
thèse porte sur « La Déclaration Universelle sur le Génome Humain
et les droits de l'Homme, Etude juridique ». Elle s'est
installée en tant qu'avocate après un parcours d'une quinzaine d'années au sein
des directions juridiques de grandes associations dans le domaine de la santé, elle est
également membre du Comité de Protection des Personnes. Elle est
spécialiste du droit des biobanques, organismes qui préparent et conservent,
pour des usages scientifiques, les échantillons biologiques notamment humains
et a rédigé plusieurs articles sur les questions engendrées par l’activité de
ces organismes. Elle enseigne le droit
de la recherche biomédicale en Master 2 à l'université de Créteil (Paris 12)
dans le Master 2 Droit de la Bioéthique et Droit de la Santé,
elle a également enseigné pendant 3 ans en Master 2 à Paris 11 la
spécialité Droit de la Bioéthique.
« LA RECHERCHE SCIENTIFIQUE SUR LE CORPS
MORT OU SUR SES ELEMENTS »
On s’attachera ici à décrire les pratiques
contemporaines de recherche scientifique sur le corps des personnes décédées et
ces mêmes pratiques sur les éléments du corps de ces personnes. Le législateur
français, en effet, a fini par construire un encadrement strict de l’usage
scientifique du cadavre tandis que les usages des éléments, voire des produits
du corps humain prélevés ou recueillis du vivant de la personne ne s’interrompent
pas avec le décès. Nous tenterons d’interroger cette différence de régime.
Arnaud
DEGOUZON est docteur en droit, sa thèse porte
sur « La notion de sceau authentique
au Moyen Âge : doctrine et pratiques », est a également obtenu le
diplôme supérieur
du notariat. Il est le président de Roc-Eclerc
Montreuil - Pompes funèbres et marbrerie de l'Est parisien SAS.
« LE TRAITEMENT JURIDIQUE DU CADAVRE,
INTERDICTIONS & AUTORISATIONS »
Le
code général des collectivités régionales règlemente par les articles L2223-19
à L2223-46 et R 2223-46 à R 2223-69, les conditions de transport et d’inhumation
des défunts, mais aussi les interdictions faites aux professionnels des
entreprises funéraires comme aux particuliers. Quelles soient communes ou
spécifiques, ces règles laissent pourtant des vides juridiques auxquels la
jurisprudence tente d’apporter des éclairages.
Dominique
LUCIANI-MIEN,
avocate pendant 15 ans, maître de conférences en droit privé
et sciences criminelles depuis 2010 à l’université de Cergy-Pontoise.
Elle enseigne également à Lyon 2 et Lyon 3. Docteur en droit pénal
de Paris II (Panthéon-Assas), elle travaille essentiellement sur
les droits de la défense en procédure pénale et sur les droits procéduraux.
« LES CORPS DES
SUPPLICIES SERONT DELIVRES A LEURS FAMILLES, SI ELLES LES RECLAMENT, A LA
CHARGE PAR ELLES DE LES FAIRE INHUMER SANS AUCUN APPAREIL », (ART. 14
CP)
L'extrait était en
vigueur jusqu'à l'abrogation de la peine de mort en 1981. L’intervention
portera sur les interdictions faites aux familles des condamnés à mort
d'enterrer librement leurs défunts, en distinguant entre les condamnés à mort
de droit commun (guillotinés) et les condamnés à mort pour raison politique
(fusillés). Les prohibitions concernant les sépultures des condamnés sont
restées en vigueur après l'abolition de la peine de mort. Mais la plupart des
condamnés n'ont pas été réclamés par leurs familles et leurs corps enterrés
dans des carrés réservés aux condamnés à mort sont désormais semble-t-il voués
à un anonymat définitif.
Muriel
PARADELLE est
Professeure agrégée de la Faculté de droit/Section droit civil de l’Université
d’Ottawa (Canada). Au nombre de ses champs de recherche, figure la question des
défis que pose à la justice et au droit le jugement des crimes politiques de
masse, dont, à titre principal, les génocides. Elle s’intéresse, également, aux
moyens de diffuser, autrement que par les canaux académiques et scientifiques
usuels, les résultats de cette recherche.
Brandon
SILVER est
Etudiant à la Faculté de droit/Section droit civil de l’Université d’Ottawa
(Canada). Ses centres d’intérêt sont axés autour des processus législatifs,
dont l’application des théories juridiques et leur impact sur la conception et
la pratique du droit. Il a également travaillé, à titre d’assistant de recherche,
en droit international et droit comparé.
« POUR
QUE LA MORT METTE FIN A LEUR TYRANNIE : DISCUSSION AUTOUR DU STATUT
JURIDIQUE DU CADAVRE DES AUTEURS DE CRIMES POLITIQUES DE MASSE »
A partir d’une étude, qui
emprunte à l’histoire, au droit et à la sociologie, il s’agira d’analyser le
dilemme que pose, à la justice, le sort réservé aux cadavres des auteurs de
crimes politiques de masse condamnés à mort. Celui-ci, en effet, oscille presque
invariablement entre : d’une part, la volonté de monstration de la justice
à travers l’exécution publique et l’exposition des corps suppliciés, lesquelles
remplissent alors une fonction exemplaire d’édification en même temps que de
rupture ; d’autre part, la volonté opposée d’escamotage, aux yeux du public, de
l’une comme de l’autre, justifiée par la crainte de voir naître un culte du
martyr susceptible d’entretenir les idéologies meurtrières dont ils étaient les
porteurs. Il s’agira, dès lors, de s’interroger sur le statut juridique de ces
« corps vils », ainsi que sur les catégories du droit qui
permettraient, éventuellement, de s’en saisir pour décider de leur sort,
sachant que nous nous trouvons en présence, ici, d’une situation de vide juridique.