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16 juin 2011

ULBruxelles, Fac Droit,, ARC "Le juge, un acteur en mutation", Appel à communication: "La vérité en procès", Bruxelles, 8-9 déc 2011 (limite: 30 juil 2011)

Information transmise par G. Cazals:
Université libre de Bruxelles  
Faculté de droit
ARC Le juge, un acteur en mutation
 Appel à communication 
Colloque
La vérité en procès


Bruxelles

8-9 décembre 2011
(limite: 30 juillet 2011)


Présentation
La Faculté de droit de l’Université libre de Bruxelles organise un colloque international les 8 et 9 décembre 2011 dans la cadre d’une recherche menée sur le rôle du juge et ses grandes mutations contemporaines (ARC Le juge, un acteur en mutation). Ce colloque sera consacré aux rapports du juge à la vérité, lorsque la portée de celle-ci excède politiquement le cadre strictement judiciaire.

La vérité, comme enjeu collectif, fait en effet l’objet d’assauts en tous genres: des lois définissent des «vérités» sur l’histoire à l’intention du juge à travers la pénalisation du négationnisme ou «pré-qualifient» des faits historiques à l’instar de certaines lois mémorielles; à l’inverse, des justiciables somment le juge de se prononcer sur la nature de régimes politiques, ou se parent eux-mêmes de son decorum dans des mises en scène telles que les tribunaux d’opinion, lorsqu’ils cherchent à établir la reconnaissance politique d’une vérité. Le juge se trouve confronté à des lois qui semblent verrouiller la vérité collective en l’imposant généralement et durablement à tous les acteurs, alors même qu’il est aussi de plus en plus perçu par la société comme une ressource politique pour établir, renforcer ou concurrencer une vérité officielle, au point que les citoyens cherchent parfois à s’approprier sa fonction.
La tension entre ces deux tendances – qui renvoient à la fois à la légifération sur la vérité et à la judiciarisation de l’action politique – est-elle paradoxale? Que dit-elle des rapports, dans notre société, entre, d’une part, la vérité supposée neutre et partagée et, d’autre part, l’action politique par définition partiale et engagée? Et quel rôle le juge est-il amené à jouer dans l’articulation de la vérité et de la politique ?
Ce colloque voudrait explorer ces questions à partir d’une sélection de précédents types mettant le juge aux prises avec la construction d’une vérité politique.
Quatre sessions thématiques et interdisciplinaires sont proposées: vérité scientifique, vérité religieuse (I); vérité historique, vérité protégée (II); vérité singulière, vérité symbolique (III); vérité “judiciaire”, vérité “populaire” (IV). L’objectif de ce colloque est de se focaliser sur des cas précis qui seront soumis à une lecture pluridisciplinaire de juristes, historiens, politologues et sociologues du droit.
 Session I - Vérité religieuse, vérité scientifique

Cette première session sera consacrée à une mise en perspective historique de la fonction politique du juge par rapport à une vérité officielle, qu’elle soit, selon les époques, religieuse ou scientifique. A la base de la problématisation de la session se retrouvent quelques cas comme le procès de Giordano Bruno sous l’Inquisition, le juge ecclésiastique et les procès pour sorcellerie ou le juge américain face au créationnisme. Comment les juges ecclésiastiques, par exemple, se sont-ils positionnés face à la défense d’une vérité cosmologique incompatible avec les dogmes de l’Église, ou encore face aux pratiques “médicales” liées à la sorcellerie? De manière plus contemporaine, comment le juge séculier, en particulier aux États-Unis, départage-t-il des vérités concurrentes dans les affaires qui mettent en cause la présence des théories évolutionnistes puis créationnistes dans les programmes d’enseignement?
 
Session II : Vérité historique, vérité protégée
Les lois mémorielles ou les lois anti-négationnistes adoptées au niveau national ou international renferment une définition de faits historiques en amont de la décision d’un juge proprement dite. Les cas présentés dans cette session permettent d’examiner diverses stratégies d’acteurs pour obtenir, à travers des procès, des lectures autorisées ou labellisées de l’Histoire. Pour donner quelques exemples, il s’agit de l’activation du juge pénal pour réprimer le négationnisme, de l’utilisation de la procédure en diffamation de la part de personnes qualifiées de négationnistes ou l’activation du juge civil pour réprimer le négationnisme. La vérité établie d’autorité par une volonté politique du législateur sert-elle de tremplin ou de cadenas à une décision de justice dans les mobilisations examinées ? Le juge est-il astreint à la passivité et à la validation d’une vérité politique défendue en amont par le législateur, ou maintient-il son activité, et selon quelles modalités?

Session III – Vérité singulière, vérité symbolique

Cette troisième session sera consacrée à des affaires qui, tout en concernant l’établissement des faits dans une affaire singulière, ont un impact symbolique qui déborde le cas d’espèce. L’on pense par exemple à la reconnaissance judiciaire d’un «droit à la vérité» en Argentine par le juge pénal au bénéfice de la société toute entière et ses conséquences politiques ; à l’activation des juges du Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie, ou à l’activation de la voie judiciaire par l’État pour établir une vérité politique en rapport avec l'identité nationale, tels que le procès d’Eichmann ou de Barbie. Plus précisément, l’objectif de cette session est d’examiner l’usage politique de la vérité judiciaire dans le cadre de stratégies d’acteurs divers: les victimes, les associations de défense de droits de l’homme, les institutions internationales, mais aussi les États eux-mêmes dès lors qu’il s’agit de (re)construire l’identité nationale.

SESSION IV - Vérité «judiciaire», vérité «populaire»

Juge hors jeu, juge dans le jeu ? Cette session s’intéresse aux institutions en marge des arènes judiciaires mais qui en empruntent néanmoins certains traits saillants, de manière partielle, voire parodique ou fictionnelle: les commissions de vérité et réconciliation mises en place après des conflits ; les «tribunaux révolutionnaires», de Marie-Antoinette au procès Ceausescu ; les tribunaux d’opinion. La problématique de cette session s’articule autour des questions suivantes: comment faire sens de la judiciarisation croissante des Commissions «vérité», dispositifs pourtant initialement conçus comme justice alternative dans le cadre des difficultés rencontrées par la justice ordinaire à associer vérité judiciaire et réconciliation nationale? Quelle vérité collective retient-on des tribunaux révolutionnaires, dont la justice est souvent décrite comme expéditive? Pourquoi les acteurs prétendant incarner l’«opinion publique», quand ils veulent faire autorité, éprouvent-ils le besoin d’adopter les formes juridiques, voire même judiciaires?

Les chercheurs intéressés sont invités à soumettre, pour le 30 juillet au plus tard, un résumé de 2500 caractères (une page maximum), indiquant le cas qui sera présenté et comment il s’articule avec la problématique de la session choisie. Les propositions peuvent être rédigées en français ou en anglais (les langues de travail du colloque). Le colloque fera en outre l’objet d’une publication.
Les propositions de communication sont à envoyer à Benjamin Lachterman benjamin.lachterman@ulb.ac.be  


Les propositions seront sélectionnées par un comité scientifique composé par:
  • Julie Allard, FNRS-Centre de droit public
  • Thomas Berns, Centre de recherche en philosophie
  • Ramona Coman, Centre d’étude de la vie politique (CEVIPOL)
  • Olivier Corten, Centre de droit international
  • François Dubuisson, Centre de droit international
  • Martyna Falkowska, Centre de droit international
  • Vincent Lefebve, Centre de droit public
  • Patricia Naftali. FNRS-Centre de droit public
Ce colloque est organisé dans le cadre de l’Action de Recherche Concertée Le juge, un acteur en mutation, projet de recherche coordonné pour ce colloque par Julie Allard et Olivier Corten.

Site de l'ARC Le juge, un acteur en mutation: http://www.ulb.ac.be/facs/droit/ARC.html#title-4