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8 sept. 2012

Univ. Paris Descartes (IHD), CTAD, Ecole de droit de Sc. Po, Appel à contributions, colloq: "Des traités aux manuels de droit. Une histoire de la littérature juridique comme forme du discours universitaire", Paris, 28-29 mars 2013 (limite: 15 oct. 2012)

Information transmise par A.-S. Chambost:
Université Paris Descartes (Institut d'Histoire du Droit)


Centre de Théorie et Analyse du Droit
(UMR 7074 - Université Paris Ouest Nanterre La Défense, ENS, EHESS)

Ecole de droit de Sciences Po (EA 4461) 

Appel à contributions
Colloque

Des traités aux manuels de droit
Une histoire de la littérature juridique comme forme du discours universitaire 

Paris
28-29 mars 2013
(limite:  15 octobre 2012)

Présentation
Historiquement, l’objet essentiel du cours universitaire est la connaissance, fondée sur des contenus de savoirs produits par les universitaires eux-mêmes. Dans cette perspective, la tradition a longtemps induit une sorte de déni pédagogique, avec un cours magistral longtemps destiné à une élite, appelée elle-même à perpétuer l’institution. Mais depuis la fin du XIXe siècle, avec l’entrée à l’université d’un public nouveau et nombreux, les professeurs de droit se sont davantage soucié de la réception de leur enseignement; de producteurs de savoir, ils sont progressivement devenus des diffuseurs de savoir, ce dont témoigne l’évolution de cette forme particulière de la littérature juridique qu’est l’ouvrage pédagogique. 

Regroupant l’essentiel des connaissances relatives à un domaine donné, le caractère didactique et le format maniable du manuel (lat. manus, main) le distinguent du traité, dont les lourds volumes caractérisent la production scientifique des professeurs de droit du début du XIXe siècle. Dans leur analyse du code civil, les exégètes ne se soucient guère de pédagogie, obligeant les étudiants à s’appuyer sur les répétitions pour préparer les examens (ces textes étaient essentiellement rédigés par des praticiens). Ce n’est qu’à la fin du XIXe siècle, dans le prolongement de l’arrêté du 24 juillet 1895 qui autorise les professeurs à s’émanciper du Code civil, que les professeurs de droit rédigent les premiers manuels (on précisera toutefois que la prescription officielle était en réalité interprétée assez souplement, les professeurs suivant de moins en moins l’ordre du Code dans leurs cours). Impossible en tout cas de dissocier cet effort de vulgarisation de l’essor de la démocratie politique à la fin du XIXe siècle. 

Mais si le manuel de droit est rédigé par les professeurs, son caractère didactique se fonde toujours sur une dimension scientifique essentielle, qui en ferait peut-être la spécificité. Distinct des articles ou des thèses, qui adoptent un point de vue spécifique, le manuel apparaît en outre comme l’un des vecteurs de la structuration du droit, dont il contribue en particulier à soutenir le développement de nouvelles branches. 

Depuis la fin des années 70, les manuels sont devenus un objet de la recherche en sciences sociales, dans le cadre des études sur la pédagogie universitaire. L’étude de l’histoire des manuels de droit s’inscrit donc dans cette démarche, comme une contribution au regard que les juristes portent depuis quelques années sur leur milieu (dans une approche sociale, politique et disciplinaire). Comme élément de la littérature juridique, le thème de ce colloque s’inscrit aussi dans le cadre plus général des recherches en histoire culturelle et de l’édition qui se développent au sein des facultés de droit. On songe en particulier à la Société pour l’histoire des facultés de droit et de la culture juridique, du monde des juristes et du livre juridique (et à sa Revue), à Dogma. Institut pour l'étude des disciplines dogmatiques et l'histoire générale des formes ainsi qu’aux travaux pionniers de Jacques Poumarède ou Jean-Louis Halpérin. 

Les communications pourraient s’articuler autour de 4 axes thématiques : 
  • Le contenu: Le manuel comme objet culturel peut être envisagé à travers quelques grandes figures d’auteurs et l’étude de grands manuels de droit. On pourra mener une réflexion sur les travaux préparatoires à la rédaction des ouvrages, ou la préparation du travail à travers les articles et les communications lors de congrès. On pourra aussi mettre en perspective les manuels avec les programmes universitaires, mais aussi avec les options politiques et sociales de leurs auteurs. 
  • Les manuels et la Faculté de droit: Dans leur dimension de formalisation du savoir, on peut s’interroger sur le rôle des manuels dans l’élaboration et l’organisation des sciences nouvelles, au moment où celles-ci entrent dans les facultés de droit (le développement de matières nouvelles dans les manuels de droit de la fin du XIXe siècle). On se demandera en quoi les manuels contribuent à la diffusion des savoirs...et éventuellement des idéologies. Derrière la transmission du savoir universitaire, quel rôle épistémologique et/ou idéologique peut-être reconnu aux manuels? 
  • La production et la diffusion: Le point de vue des éditeurs (préparation des manuels, à travers le choix de l’éditeur, les échanges entre l’auteur et son éditeur). Qui distingue les traités des manuels, les éditeurs ou les professeurs? Quand et pourquoi certains éditeurs se spécialisent? Quelle logique économique prévaut dans la politique des maisons d’édition? On peut aussi réfléchir à l’exploitation des notes de cours et des cours reprographiés, à travers la circulation de notes prises dans le cadre d’un cours. 
  • La réception: Réception savante, à travers les polémiques et comptes-rendus dans les revues. Les manuels sont un élément du prestige des auteurs, mais on n’oublie pas cependant que l’autorité d’un Saleilles tient aux 228 articles rédigés en 25 ans, alors que sa bibliographie ne compte aucun manuel. Il faut aussi envisager la capacité de certains manuels à avoir une vie au-delà des cercles purement savants (utilisation par les professionnels, vulgarisation pour une diffusion scolaire). Quels sont alors les publics visés par les manuels? On pourra enfin aborder le rôle des bibliothèques (politique d’achat). 
Responsables scientifiques
  • Anne-Sophie Chambost (Paris Descartes) coordinatrice 
  • Frédéric Audren (Ecole de droit de Sciences Po)
  • Fatiha Cherfouh (Paris Descartes)
  • Arnaud Vergne (Paris Descartes) 
Comité scientifique
  • Pierre Bonin (Paris I Panthéon Sorbonne)
  • Christian Chène (Paris Descartes)
  • Jean-Louis Halpérin (ENS Ulm)
  • Christophe Jamin (Ecole de droit de Sciences Po)
  • Jean-Yves Mollier (Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines)
  • Jacques Poumarède (université Toulouse 1) 
Pratique
Les propositions de communication feront mention du rattachement institutionnel et disciplinaire et seront accompagnées d’une proposition de titre et d’un argumentaire d’une quinzaine de lignes. Elles sont à adresser, au plus tard, le 15 octobre 2012, par courriel: traites.manuels@droit.parisdescartes.fr
Les propositions de communication seront examinées et sélectionnées par le Comité scientifique, qui établira le programme pour le 1er novembre 2013. 

Bibliographie indicative
  • AUDREN F., FILLON C., «Louis Josserand ou la construction de l’autorité doctrinale», RTDciv., janvier mars 2009, 1, p.39-76 
  • BONIN P., «Entre républicanisme militant et nostalgie monarchiste: les manuels d’histoire du droit d’Esmein à Olivier-Martin», in AUDREN F., Histoire du droit, politique et idéologie; enquête sur les fondements idéologiques d’une discipline juridique, Sciences Po, 5/10/2011 (à paraître). 
  • CAILLOSSE J, Introduire au droit, Montchrétien (coll. Clés politique), 1998 (3e éd.). 
  • CHENE C., «Manuels, Traités et autres livres (période moderne)», Dictionnaire de la culture juridique, PUF Quadrige 2003.
  • HAKIM N., MELLERAY F., Le renouveau de la doctrine française. Les grands auteurs de la pensée juridique au tournant du XXe siècle, Dalloz, 2009. 
  • HALPERIN J.L., «Manuels, Traités et autres livres (Période contemporaine)», Dictionnaire de la culture juridique, PUF Quadrige, 2003.
  • HALPERIN J.L., «Est-il temps de déconstruire les mythes de l’histoire du droit français», Clio@Themis, n°5, 2012.
  • HORDERN F., «Les manuels de droit du travail, de 1884 aux années 1970», Cahiers de l’Institut régional du travail, Aix-en-Provence, n°16, 2008, p.76-83. 
  • JAMIN C., JESTAZ P., La doctrine, Dalloz, 2004 
  • LAVIGNE P. «Les manuels de droit administratif pour les étudiants des facultés, de 1829 à 1922», Annales d’histoire des facultés de droit, 1985, n°2, p.125-134. 
  • MOLLIER J.Y., «Dalloz», in FOUCHÉ P., PÉCHOIN D., SCHUWER P. (dir.), Dictionnaire encyclopédique du livre, t.1, éd. du Cercle littéraire, 2002.
  • MOLLIER J.Y., «Editer le droit après la Révolution française», Histoire et civilisation du livre. Revue internationale, janvier 2005.
  • POUMARÈDE J., «Penser l’Absolutisme. Approche historiographique des ouvrages pédagogiques en histoire des institutions françaises», Itinéraire(s) d’un historien du droit. Jacques Poumarède, regards croisés sur la naissance de nos institutions, CNRS (coll. Méridiennes), 2011.