Droit et
images
CRHIPA-Ecole Française de Rome- Villa Médicis
Cycle de colloques
Appel à
communications
Le droit
aux images
Rome
2 et 3 décembre 2013
(limite: 30 mai 2013)
En 2009, une exposition de photographie à la
Bibliothèque nationale de France et à Lausanne intitulée «Controverse:
photographie à histoire» avait fait date: elle dévoilait des images censurées
qui avaient provoqué un procès non seulement pour outrage à la pudeur mais
aussi pour atteinte à la dignité de la personne. Cette «juridification» autour
de l’image semble être le propre de notre monde contemporain. Elle a été
fortement réactivée ces quinze dernières années avec l’usage proliférant de
l’image sur internet qui oblige les juristes à penser sans cesse leur statut.
Pourtant la place des images dans le droit et l’image comme objet du droit a
une histoire encore méconnue que cette série de colloques a pour ambition
d’éclairer.
En effet, si les travaux sur les représentations de la justice du Moyen
Âge à l’époque contemporaine sont fort nombreux[1],
seules quelques études sporadiques ont montré que dès l’antiquité, les juristes
portent un intérêt immense à la question des images. Celles-ci prennent
pleinement place dans les nombreux conflits sociaux et politiques que la Justice
devait trancher.
Dans l’Antiquité, les
conditions juridiques de création et d’usage des images sont encore mal
définies, même si la documentation ne manque pas. Les images des notables de la
cité, mais aussi les représentations divines et impériales sont autant de type
d’images réglées par des usages juridiques. Un ensemble de lois antiques
concerne en effet les images qu’elles aient une fonction cultuelle ou
politique, qu’elles représentent une divinité, un empereur ou de simples
particuliers. En tout, dix-huit constitutions sont connues dans les codes
publiés sous Théodose II (438) puis sous Justinien (529) et dans les
collections de Novelles. Ces lois abordent aussi bien les préoccupations
religieuses mais aussi les représentations des puissants. La littérature
chrétienne, confortée par les sources juridiques, conciliaires ou émanant de
l’administration impériale, critique pour finalement interdire sans retour, à
partir du règne de Théodose, le culte des statues. Le processus d’élaboration
de l’image comme sa position dans l’espace urbain ont fait l’objet de
nombreuses recherches mais l’ensemble du processus, de l’attribution d’une
image, de sa conception à sa place, sans oublier les enjeux juridiques de ces
déplacements ou des enlèvements, et notamment à la fin de l’Antiquité, n’ont
pas encore fait l’objet d’une synthèse.
juristes: il constitue une
preuve décisive dans l’attestation de la noblesse et occupe une place centrale dans la question des
fidéicommis[2].
De même, les armoiries sont parfois utilisées comme preuves juridiques
d’appartenance à un groupe social déterminé[3]. Ces
dernières ont été l’objet de nombreuses études depuis plusieurs décennies, en
revanche les images plus courantes comme les sceaux ou encore les enseignes ont
souvent été considérées comme le domaine exclusif d’une histoire antiquaire
désuète. Si récemment, l’ouvrage de Hans Belting sur l’anthropologie des images
a mis en avant leurs usages sociaux, il n’en demeure pas moins que leur lien
étroit avec le droit, leur place dans le débat juridique et leur emploi
spécifique dans le monde des juristes n’est apparu que partiellement, à
l’exception notable des travaux sur l’utilisation judiciaire des images à
travers le cas singulier des exécutions en effigie[4]. Pourtant,
des études consacrées à l’emblématique juridique, un champ tout juste défriché[5],
montrent combien les juristes non seulement pensaient avec les images, mais ils
pensaient aussi les images et leur statut conférant à ces dernières une place
décisive dans les pratiques religieuses ou politiques.
Nous vous serions reconnaissants d’envoyer vos
propositions de communication avant le 30 mai 2013 à c.dannoville@laposte.net et naima.ghermani@upmf-grenoble.fr
Notes
[1] Par exemple: R. Jacob, Images
de la justice, essai sur l’iconographie judiciaire du Moyen Âge à l’âge
classique, Paris, 1994;
W.Sellert, Recht und
Gerechtigkeit in der Kunst, Göttingen, 1993; D. Curtis et J. Resnik, Representing Justice. Invention, Controversy and Rights
in City-States and Democratic Courtrooms, Yale, 2011.
[2] S. Costa, Dans l’intimité d’un collectionneur, Livio Odescalchi et le faste
baroque,
Paris, 2009, p. 175-176.
[3]
H. Belting, Pour une anthropologie des images, trad. fr., Paris, 2004. Voir aussi P.
Zanker, Augustus und die Macht der Bilder, Munich, 2010.
[4] S. Edgerton, Pictures
and Punishment. Art and Criminal Prosecution during the Florentine Renaissance, Oxford, 1985.
[5] V. Hayaert, Mens
emblematica et humanisme juridique,
Genève, 2008.